Gel dans les vergers : Cerises, pommes... des dégâts considérables chez les arboriculteurs du Doubs, Jura, Haute-Saône

La végétation était bien partie, encouragée par la douceur des températures, le coup de gel et de neige arrivé les 7 et 8 avril n'en a été que plus dévastateur : cerises, pommes, poires et fraises, de Fougerolles à Sellières en passant par Rioz et la vallée de la Loue, les dégâts sont énormes.
 

"Les dégâts sont considérables, et ce n'est pas fini"...

Un arboriculteur de Franche-Comté

La France entière a été touchée par les températures très basses, bien en-dessous du 0°, toutes les cultures ont subi de plein fouet le gel et la neige. Même le ministre de l'Agriculture, Julien Denormandie déclare ce vendredi 9 avril : "Il y a énormément de détresse, énormément d'émotion. La situation est inédite, exceptionnelle, elle concerne à la fois la viticulture, à la fois l'arboriculture, à la fois les grandes cultures", a-t-il ajouté. La procédure de "calamité agricole" est lancée pour les professionnels.  

En Franche-Comté, professionnels et amateurs éclairés sont catastrophés. Petit tour d'horizon avec ceux qui ont beaucoup scruté le ciel ces derniers jours, regardé attentivement les bulletins météo, et qui font le tour de leurs vergers pour tenter d'estimer les dégâts.

Une estimation bien difficile à faire

Premier constat : ils ont tous des difficultés pour chiffrer les dégâts. 

Direction le Jura, aux Vergers de Sellières, une entreprise qui propose des fruits à la cueillette aux particuliers et commercialise sa production aussi auprès des collèges et des lycées. "Le bilan est provisoire mais grave." raconte Laura Mathon, responsable avec son mari Nicolas. "De toute façon, jusqu'aux Saints de Glace, le 13 mai, on est en crise. Les pommiers sont détruits à environ 40 %. Dans un mois, on en saura davantage. Habituellement, en juin, on pratique l'éclaircissage, on enlève les petits pommes vertes pour que celles qui restent deviennent belles et bien grosses. Là, il y a déjà bien du boulot de fait. Malheureusement".

Les cerises sont touchées à 90 %, les mirabelles sont foutues.

Même constat chez un autre professionnel, Didier Costille qui gère les "Vergers de Rioz" en Haute-Saône :"C'est un peu tôt encore mais je peux vous dire que, en plus du gel, on a eu la neige sur 8-10 centimètres. Je ne sais pas ce qui a fait le plus de mal. Les cerises sont touchées à 90 %, les mirabelles sont foutues. Nos plus grandes surfaces, c'est la pomme et la poire, qui sont détruites à 80-90 %... C'est difficile à évaluer précisément mais sur un arbre, il y a 1000 à 2000 fleurs... il en reste quelques-unes. Mais vraiment pas beaucoup" constate-t-il. Ici aussi, c'est dans un mois que le bilan pourra être réellement dressé.

Chez les "amateurs" : même désolation

Eux, ce n'est pas leur principale source de revenu mais ils y tiennent à leurs cerises, leurs mirabelles.

A Fougerolles, le pays de la cerise, on fait grise mine. Jacques Daval est le président de l'association des producteurs de cerises et de kirsch. Aucun adhérent n'a que cette activité pour vivre "Mais c'est un plus..." Ici aussi, les dégâts sont importants : "Au moins la moitié, de sûr, est détruite. Les fleurs ouvertes sont devenues toutes noires. Même les fleurs pas encore ouvertes sont gelées quand même. Avec des 20-25 ° de température, la floraison était partie très tôt. Trop tôt. Quand c'est trop précoce, c'est jamais bon."

Autre cerise qui a bien souffert : la marsotte, à Mouthier-Haute-Pierre, dans la vallée de la Loue (Doubs). Ici, une coopérative agricole regroupe une quinzaine de producteurs : ils vendent leurs cerises à la coop qui presse, distille et commercialise. Marjorie Nauton en est la présidente, elle explique : "C'est simple, il faut regarder la fleur, à la base des pétales, si la mini cerise est verte, c'est encore bon, si elle est noire, c'est fichu..." Si la Loue se situe à 400 mètres d'altitude, certains cerisiers, en haut des pentes, sont à 850 mètres et ça change tout ! L'altitude, l'exposition, l'abri du vent : chaque élément compte pour "un coup de gel". 

L'an dernier, 6 tonnes de marsotte, de fauvache et de catell avaient été récoltées. Pour cette année, Marjorie Nauton avoue ne pas être très optimiste.

Léonard Tirole, lui, relativise : "Heureusement, on ne compte pas sur les mirabelles pour vivre." C'est le président de "La mirabelle en fête", une manifestation qui se déroule tous les derniers dimanches d'août à Amagney, à quelques kilomètres de Besançon. Une commune fière de "sa" mirabelle,"la meilleure, forcément" avance Léonard Tirole, en rigolant et en admettant "être un peu chauvin". Il ne s'attendait pas à une grosse production : comme la mirabelle, c'est bien une année sur quatre, et l'an dernier, c'était une bonne récolte, il n'espérait pas trop de la quantité. Il poursuit : "Dans le même verger, vous avez un arbre blanc, donc tout va bien, celui à côté est déjà jauni. On a assisté à un drôle de phénomène aussi : les arbres ont mis leurs feuilles avant même de fleurir. Je ne me l'explique pas ! Les arbres sont quand même en forme. Mais est-ce que la fête de la mirabelle aura lieu cette année ? Je ne sais pas. L'an dernier, on a annulé à cause du virus..."

La calamité agricole limitera la casse

Les professionnels, comme Didier Costille et Laura Mathon, vont remplir les dossiers de calamité agricole pour toucher des aides financières. "Elles nous aident à passer le cap" Didier Costille continue :  "En plus, on bénéficie d'une année de report pour les emprunts et ça fait du bien. En 2019, on avait eu 95 % des récoltes gelés. En mettant en chômage partiel nos salariés, 2019 est une année blanche, on ne passe pas dans le rouge financièrement et ça nous permet de ne pas fermer la boutique."

Laura Mathon et son mari ont repris les "Vergers de Sellières" il y a 3 ans et ils ont eu... 3 années de gel ! Elle estime que les aides de l'Etat, "C'est toujours mieux que rien." et elle compte sur quelques variétés de pommes qui ont moins souffert, comme rubinette, reine des reinettes ou encore opale.

Tous ces producteurs, professionnels ou non, se veulent philosophes. Ils connaissent "les inconvénients du métier" comme dit Didier Costille. Et ne se plaignent pas : la nature, avec ses caprices, n'a pas de secret pour eux.

 

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